De l'autre côté de la Méditerranée, entre 1991 et 2000, une insurrection islamiste combattue et vaincue par l'armée, a fait 150 000 morts. Son idéologie a traversé la mer pour empoisonner notre destin.

Après six ans de conflit, les populations musulmanes des villes algériennes investirent soudain la rue pour réclamer l’indépendance. Les protestations pacifiques de décembre 1960 prirent de court tant les autorités françaises que le Front de libération nationale (FLN). Malgré la répression, le mouvement mit en échec les tentatives du général de Gaulle d’imposer une solution politique aux dépens des nationalistes.

Mettant fin à trois siècles de présence ottomane, l’interminable conquête de l’Algérie par la France se fait dans la violence. A l’occupation militaire, et son lot de massacres et de famines, succède une dépossession foncière massive des Algériens, non sans résistance de ces derniers. L’ordre colonial transforme les Algériens en "musulmans", les distinguant des citoyens : Français, migrants européens et Juifs. Ce régime de séparation imprègne tous les pans de la vie sociale et politique.

Acte de naissance du FLN, la "Toussaint rouge" du 1er novembre 1954 marque aussi le début d’un conflit sur lequel l’ouverture des archives publiques en 2008 a considérablement aiguisé notre regard. Ces huit années de guérilla sont marquées par une logique de terreur aveugle où chacun doit choisir son camp. La "bataille d’Alger" de 1957 est avant tout une vaste entreprise de répression, où les militaires français enlèvent et torturent les militants du FLN sans pour autant réussir à étouffer les velléités indépendantistes.

L’année 1962 est celle de l’indépendance. Enfin ! Mais le pays est un chaos : les réfugiés affluent, les camps de regroupement se vident tandis que des centaines de milliers de gens fuient dans des conditions dramatiques : les Français d’Algérie et les Juifs, qui deviennent les "pieds-noirs", mais aussi les harkis, supplétifs musulmans menacés de mort. L’indépendance n’a pas tout réglé. Après vingt ans d’une dictature militaire "socialiste", le pays est déchiré par la montée de l’islamisme et bascule dans une guerre civile, qui fait 500 morts par semaine entre 1993 et 1995.