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Carnets de New York VI. Un "état de siège auditif"

01 mai 2025
Numéros de page :
pp.105-111
Au quatrième et dernier étage d'un petit immeuble de brique rouge, rempli de soleil et donnant sur des arbres, je vis à deux pas du canal de Gowanus, survolé par quelques mouettes piaillantes, dans une étonnante odeur de pétrole et de varech. Dans mon studio, dont le robinet fuit et dont le chauffage chante, j'entends le ramdam de l'été, le vrombissement des moteurs, la musique qui s'échappe des voitures en longs bandonéons sinueux, la cacophonie des bouteilles dans la poubelle à verre, le coups de sifflet brefs et stridents des arbitres sur les terrains de basket improvisés, les rires des enfants qui jouent en bas, un écho de pas qui résonne sur les marches en bois et plus loin, au milieu des terrains vagues pleins de huées et de casques, un poste de radio qui diffuse une chanson de Gil Scott-Heron. Dans cette superbe demeure cernée par tous les sons de l'Occident, j'attends. J'écoute et j'attends. J'entends.