Evoquant "Bonnie and Clyde", son premier projet comme chef décorateur, Dean Tavoularis confie au journaliste Jordan Mintzer avoir passé le tournage à anticiper la scène finale de massacre.

Jean Narboni se remémore un film de Jean-Louis Comolli où Samuel Fuller se souvient d'une bataille. D'une plage à une autre se tournent des pages d'histoire.

Il est d'usage pour les « Cahiers », en début d'année, de donner à leurs lecteurs un aperçu des « films les plus attendus ». Pour 2023, nous avons préféré, en lieu et place de ce teaser, prendre des nouvelles des cinéastes alors qu'ils sont encore en pleine préparation.

Lucas Belvaux est un cinéaste que nous suivons avec attention depuis ses débuts et c'est peu dire que nous ne sommes jamais déçus. D'abord parce qu'il pose sur la société française un regard panoramique qui met en lumière toutes ses fêlures, sociales, politiques, intimes. Il appuie là où ça fait mal, renouant sous une forme différente avec une sorte de pathos dont le cinéma français fait depuis l'avènement du réalisme poétique d'avant-guerre l'un de ses points d'ancrage.

Patrice Leconte n'avait pas donné de ses nouvelles depuis longtemps. Un sketch en 2019 dans un film collectif passé un peu inaperçu, "Salauds de pauvres". Son film précédent, "Une heure de tranquillité" n'avait pas vraiment enthousiasmé ceux qui vénèrent "Tandem" ou "La Fille sur le pont" (qui ont l'un et l'autre été l'occasion d'un de l'"ASC"). Il faut donc remonter à "Une Promesse", neuf ans déjà, pour avoir le souvenir d'un Patrice Leconte au sommet de son art. Avec "Maigret" il renoue sans aucun doute avec l'excellence.

Bien que soucieux de valoriser les cinéastes de son temps, "L'Avant scène Cinéma" se préoccupe également de se tourner vers le passé, qui, comme chacun sait, réserve bien des surprises. Ce mois-ci, la revue fait donc à nouveau de la course de fond , en revenant au grand Alfred Hitchcock. Malgré son importance capitale, le maître n'a été mis à l'honneur que deux fois dans ces colonnes à travers des classiques "Les 39 Marches" (n°249 du 1er juin 1980) et "L'Inconnu du Nord-Express" (n°297/298 des 1er et 15 décembre 1982).

"Les Pires" raconte l'histoire d'un tournage à l'arrache, par un cinéaste qui a mis ses dernières forces dans l'aventure. De ce point de vue, nous ne sommes pas loin du "Coupez !" de Michel Hazanavicius. Mais il embrasse un champ très différent, le film dans le film se voulant être une comédie dramatique sur des blessés de la vie dans une ville du Nord de la France. Et les jeunes comédiens amateurs qui sont recrutés ne donnent pas le sentiment d'être nés avec une cuillère en argent.

Après plusieurs films, documentaires et fictions, traitant de l'histoire de la Roumanie, de la question de la mémoire et du rapport entre passé et présent (sujet du remarquable "Peu importe si l'histoire nous considère comme des barbares", sorti en 2018), Radu Jude, l'une des figures les plus singulières du Nouveau Cinéma roumain, revient dans son dernier film à un sujet ancré dans la réalité contemporaine.

Dans ses mémoires, ("Roman par Polanski", Paris, Robert Laffont, 1984), évoquant un tournage qui se passe assez mal pour lui, Roman Polanski a cette phrase qui mérite peut-être qu'on s'y arrête quelques minutes et qu'on la développe, car elle établit une sorte de loi ou de principe qu'il nous faut tenter de vérifier : "Il ne faut jamais attendre longtemps, pendant un tournage, quel qu'il soit, avant que l'atmosphère hors plateau ne se mette à refléter celle de l'intrigue même".

Vicente Molina Foix est romancier, poète, traducteur, auteur de nouvelles et critique de cinéma. "Kubrick en casa" relate sa collaboration avec Stanley Kubrick pour lequel il a rédigé les sous-titres en espagnol de : "Les Sentiers de la gloire", "Orange mécanique", "Shining", "Full Metal Jacket" et "Eyes Wide Shut". Tout a commencé en 1978 afin de préparer la sortie en salles en 1980 de la version originale d'"Orange mécanique".

Le désert pose au cinéma une question essentielle : autant étendue qu'entité, physique que métaphysique, il est l'endroit où l'espace se vide du temps, où le temps se convertit en espace. Rien ne sert de le circonscrire en une image, car l'immensité de ses lignes et de son silence fuit par tous les bords du cadre.