Georges Perros lui-même se considérait comme un voyageur en transit, entre deux trains ou sur un quai de gare. Il est resté toute sa vie cet «étonné d'être là», qui ne se remet pas d'être né sans l'avoir voulu, d'où le besoin d'habiter les coulisses, celles de l'existence comme celles de l'écriture, où il n'est jamais possible de tricher, où l'on se sent passer par soi pour «être vécu». Hanté par le taciturne goût de vivre, Perros est un «homme de l'être» dont l'oeuvre, à la fois en retrait et à l'affût, est avant tout une extraordinaire et exigeante sollicitation de l'autre.

Né à Saint-Gilles (Belgique), il fait ses études au lycée français de Bruxelles et à l'Université de Bordeaux. Il a été professeur puis conseiller littéraire des Éditions Julliard avant d'être directeur littéraire des Éditions Denoël. Sous la verve et l'ironie de l'écrivain veillent une pensée grave, une sensibilité vive. Essais : Paris perdu (1942), Vie du Père Surin (1943), Essai sur l'avenir de la religion (1945), Anthologie littéraire de l'occultisme (avec Robert Amadou), Vingt ans en 1951 (avec Gilbert Sigaux), Des écrivains et des hommes (avec Gilbert Sigaux).

Christopher Isherwood est né en 1904 en Angleterre. Après Cambridge et de brèves études de médecine, il : séjourne à Berlin, où il écrit Mr. Norris change de train (1935) et Adieu à Berlin (1939), livre dont seront tirés plus tard une pièce de théâtre et deux films, le dernier en date étant le fameux Cabaret. Depuis 1939, il vit en Californie. Il a publié notamment La Violette du Prater, Le Monde au crépuscule, L'Ami de passage Un homme au singulier. II a récemment entrepris son autobiographie avec Christopher et son mode qu'a suivi Mon gourou et son disciple, à paraître dans la même collection.

Un écrivain face à lui-même : ainsi se présente cet ouvrage d'Arthur Koestler. En rassemblant de larges extraits de ses écrits et en les commentant, l'auteur fait une oeuvre orgininale où l'on découvre à la fois une autobiographie intellectuelle, une autocritique, et une émouvante invitation au voyage vers des horizons peu explorés....

La Moisson du Phénix est le cinquième et dernier volet (jusqu'à ce jour) de l'autobiographie de Han Suyin, après "L'Arbre blessé", "Une fleur mortelle", "Un été sans oiseaux" et "Ma maison a deux portes". Ce dernier volume évoque la période de 1966 à 1979, période tragiquement marquée par la Révolution culturelle. Et Han Suyin sera si troublée par ce bouleversement politique et social qu'elle arrête d'écrire des romans pour uniquement témoigner. Nous pénétrons avec elle dans l'intimité des grands de la politique chinoise: Mao qui s'affaiblit, sa femme Tsiang Tsing qui se conduit en impératrice paranoïaque, elle impose à toutes les Chinoises son modèle de robe! Lin Piao, -l'infidèle, le grand Chou En-Lai dont la mort fut célébrée par des milliers de fleurs blanches déposées spontanément par la population sur la place Tien An Men à Pékin. La lutte pour la succession de Mao déchaîna les esprits à l'intérieur comme à l'extérieur du Parti. L'auteur montre aussi la vie de la bourgeoisie et des élites intellectuelles et artistiques, ces classes sociales que la révolution veut anéantir; les amis de Han Suyin, écrivains, peintres et scientifiques sont envoyés aux champs quand les gardes rouges ne les condamnent pas à nettoyer les cabinets des établissements qu'ils dirigeaient. Les ultra-gauchistes prêchent la révolte aux lycéens et aux étudiants vis-à-vis de leurs professeurs. Tout le monde doit « lutter, critiquer et transformer ». Quand la « bande des quatre » dirigée par l'épouse de Mao est enfin arrêtée le pays sort de la terreur, le phénix renaît de ses cendres. L'auteur sait rendre compte de l'extraordinaire pouvoir d'endurance du peuple chinois. Elle ne s'engage pas, ne juge pas, mais rien, dit-elle, ne sera plus comme avant. Sont repoussés, pour un temps, l'obscurantisme, le despotisme, la condition féodale de la femme, le refus de l'étranger.

« Avais-je rêvé ma vie à Buchenwald ? Ou bien, tout au contraire, ma vie n'était-elle qu'un rêve depuis mon retour de Buchenwald ? » Quel beau dimanche !, que Semprun tient pour son livre « essentiel », sera cette vertigineuse recherche d'identité d'un double rescapé du nazisme et du stalinisme. Ici, l'ancien dirigeant du Parti communiste espagnol clandestin, en homme presque suspect à lui-même, cherche à dire, à comprendre quelle fut son histoire dans l'histoire du siècle. Inspiré, et même commandé par la lecture d'Une Journée d'Ivan Denissovitch de Soljenitsyne, ce livre est aussi une réflexion irréductible sur la mort de la Révolution.