Découvert en France avec l'excellent "Freesia", série dystopique publiée au début des années 2010 chez Kazé Manga, Jirô Matsumoto a depuis disparu du marché hexagonal. Trop perché, trop radical, trop mordant, peut-être ? Cette inexplicable maldonne est enfin corrigée par l'éditeur Noeve Grafx, qui libère le mangaka du purgatoire en sortant son volcanique "Beautiful Place", une "girls with guns story" où le Japon est transformé en champ de bataille sur lequel s'affrontent de très cool lycéennes armées jusqu'aux cils. Pourquoi diable Jirô Matsumoto a-t-il de telles lubies ?

Fuyumi Sôryô est une autrice de la rupture. Rétive aux exigences éditoriales et aux méthodes de travail traditionnelles, elle trace un sillon passionnant, car farouchement personnel, dans une industrie qui fait souvent peu de cas des sensibilités dissidentes. Rencontrée à Tokyo à l'occasion de la ressortie en édition perfect de "Mars" chez Panini, la mangaka nous a détaillé quelques-unes de ses aventures éditoriales avec une spontanéité décoiffante.

Féru de mystères, Richard D. Nolane semble s'être créé à partir des pages d'un bestiaire fantastique. Véritable kraken de l'édition, l'homme a patiemment étendu ses tentacules du monde du roman noir à celui de la bande dessinée avec la même facilité qu'un Jean-Claude Van Damme faisant le grand écart facial. En cinquante ans de carrière et moult coups d'éclat éditoriaux, le scénariste de "Wunderwaffen" et de "Warbirds" nous résume non sans humour les grands moments d'une carrière que beaucoup aimeraient posséder.

Qui mieux que Keko pouvait mettre en images l'histoire effrayante de Carlos Portela racontant une ville où sont parqués des délinquants sexuels ? Cette prison à ciel ouvert avait besoin de ce dessin noir et pesant pour prendre toute sa dimension. Rencontre avec ses auteurs venus d'Espagne dans un hôtel cosy de Paris.

Il faut être un peu poète pour comprendre le langage des pierres ; un peu savant fou pour écouter ce qu'elles ont à dire. Alex Chauvel s'y est essayé, il a tendu l'oreille et entendu le minéral lui raconter les civilisations. les mythes et les sciences. Il a perçu ce que le tout petit connaît du plus grand, et s'est dit que tout ça méritait bien une histoire et quelques dessins. Cette histoire est celle du monde, la nôtre. à hauteur de microbes aux noms de fragments de roche.

En 2019, même si la nouvelle n'a pas fait le tour des journaux télévisés de France et de Navarre, Fabrice Erre quittait l'enseignement, la nouvelle réforme du lycée finissant de le convaincre de franchir le pas et de vivre du dessin. Bien lui en a pris car, du point de vue de Frédéric Bosser, il est aujourd'hui l'homme le plus drôle du 9e art. Interview express lors d'un voyage à Paris juste avant de se rendre à Livre Paris pour rencontrer son public.

C'est un été grave et léger en bord de mer. Venant se fondre au décor vaporeux et au pastel de journées qui passent et se ressemblent, quelques personnages apparaissent tels des songes. Leurs contours sont ronds, onduleux, liquides, flottants - existent-ils seulement ? Ils forment une petite communauté isolée à l'abri des vents extérieurs, parfois auréolée de silence, parfois aimant partager des futilités ou laisser poindre l'étendue de douleurs intimes, qui se devinent dans les sonorités mêmes de leurs prénoms.

Elisabeth Jammes est passée par l'école Émile Cohl (école spécialisée en animation et illustration) avant de faire de sa passion pour la bande dessinée un métier. Après quelques années de galère, durant lesquelles elle enchaîne les missions en free-lance pour faire bouillir la marmite, elle publie ses premiers albums en tant que dessinatrice, à savoir deux tomes de "L'École de Montperdu", ainsi qu'un volume de "Spartiate".

Auteur polymorphe, Jean Giraud/Moebius a laissé derrière lui une oeuvre à facettes et une autobiographie qui brouille un peu les pistes. Pilier de la bande dessinée internationale moderne, aussi doué en western que pour dessiner les mondes du futur, l'artiste français qui a inspiré les plus grands réalisateurs de cinéma méritait qu'un journaliste se penche sur l'ensemble de son oeuvre. Grâce à Christophe Quillien, et après quelques années d'un travail de Romain, le vide est comblé avec la sortie de la biographie la plus complète qui soit sur le père de Blueberry et du Major Fatal.

Même s'il vit et travaille à Nancy, c'est à Metz, plus exactement à la cafétéria du musée Pompidou, que Frédéric Bosser a retrouvé Romain Dutreix après une visite de l'exposition en cours consacrée à André Masson. La raison de cette rencontre : sa première BD grand format chez Dargaud. Mais la discussion s'est aussi orientée vers son travail de caricaturiste au Canard enchaîné. Morceaux choisis ...

En faisant de la Bibliothèque publique d'information du Centre Pompidou son île éphémère, Corto Maltese, le marin d'Hugo Pratt, rejoint Gaston Lagaffe et devient le deuxième personnage-titre de bande dessinée à se voir consacrer une exposition monographique. "Corto Maltese. Une vie romanesque" conserve dès son intitulé l'idée de flottement chère à son créateur, qui aimait dire qu'il "passait (sa) vie à raconter la vérité comme si c'était un mensonge". Le voyageur aurait donc bien vécu - et peu importe si cette vie est tout entière de papier : elle a pour elle l'éternité.