Aller au contenu principal

Moraliser les âges de la vie

l'exemple de l'Ovide moralisé et de ses antécédents latins
Bulletin : Le Moyen âge 3
01 juillet 2024
Numéros de page :
16 p. / p. 773-788 : ill. en coul.
L’horizon mental du Moyen Âge est d’abord un horizon analogique : tout se reflète dans tout, le macrocosme est image du microcosme, tout le visible est signe de l’invisible, la nature est comme un grand livre qu’il s’agit de déchiffrer et d’interpréter, et qui renvoie en dernier ressort au Créateur. Les âges de la vie n’échappent pas à ces « vertiges de l’analogie », pour reprendre les termes de P. Descola : ils sont rarement analysés pour eux-mêmes. La série des âges est ainsi le plus souvent mise en parallèle avec d’autres séries, qui en déterminent le nombre ; structure molle qui s’adapte facilement aux séries rigides que constituent les quatre éléments ou l’hexaemeron. Les âges de la vie s’inscrivent à la fois dans la pensée sérielle et dans une ontologie analogique qui n’a rien d’un fixisme, au contraire. Donnons quelques exemples de ces séries et de leur plasticité. La série pourra d’abord être sexténaire lorsque l’on voudra mettre en analogie les âges de la vie avec les six jours de la création ou les six âges du monde. Augustin, dans le De Genesi contra Manichaeos (388–389), met ainsi en parallèle l’hexaemeron avec les âges du monde et les âges de la vie selon le tableau suivant : Les conséquences de cette vision et de cette analogie entre l’histoire de l’humanité et la vie humaine, de cette conception de l’humanité comme un grand homme qui passe par différentes étapes de l’enfance à la vieillesse, sont multiples. La plus importante est que le présent est le temps de la décrépitude …