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Carrefour et Coopérative U lancent une nouvelle alliance européenne aux achats

Numéros de page :
pp.18-19
Carrefour et Coopérative U ont officialisé le 7 juillet 2025 la création d’une alliance européenne aux achats, baptisée Concordis, pour négocier avec les plus grandes marques. Cette alliance, basée à Bruxelles, repose sur deux structures : CWT (Carrefour World Trade) pour la négociation des prestations de service (« on-top ») et Eureca pour la négociation des tarifs de base (« 3xnet »). L’accord, d’une durée de six ans, vise à mutualiser les négociations commerciales dès la campagne 2026, avec la possibilité d’élargir le périmètre aux marques de distributeur (MDD) et au non-alimentaire, notamment le textile. D’autres distributeurs européens pourraient rejoindre Concordis. L’alliance cible en priorité les 40 plus grands fournisseurs de produits de grande consommation (PGC), qui représentent environ 40 % du chiffre d’affaires du secteur. Les négociations porteront sur des socles tarifaires communs et des prestations de services additionnelles, avec une soixantaine de prestations « on-top » envisagées. Les membres de l’alliance resteront autonomes sur leurs produits différenciants, mais pourront lancer des appels d’offres conjoints sur des produits standards. En France, Carrefour affiche un chiffre d’affaires de 43,95 milliards d’euros et Coopérative U 34,12 milliards d’euros, soit un total de plus de 78 milliards d’euros. Ensemble, ils détiennent 34,1 % de part de marché sur les produits alimentaires et d’hygiène-beauté à mi-juin 2025, selon Kantar. Avec l’ensemble Aura (Intermarché, Auchan, Casino) à 29,3 % de part de marché et E. Leclerc à 24,6 %, le marché français se retrouve dominé par un triumvirat contrôlant plus de 88 % du marché. Lidl (8 %) et Aldi (2,8 %) restent les seuls acteurs majeurs hors alliances. Les professionnels estiment qu’un doublement de la taille d’un distributeur aux achats permet d’améliorer de 1 à 2 points ses conditions tarifaires. L’alliance vise donc à renforcer la compétitivité de ses membres, notamment par la massification des volumes, la négociation directe et la vente de services internationaux. Concordis ambitionne d’attirer d’autres distributeurs européens pour accroître encore son poids. Dominique Schelcher, PDG de Coopérative U, voit dans ce projet un levier pour atteindre 15 % de part de marché d’ici 2030. Coopérative U prévoit également de conclure un accord avec Unlimitail, filiale commune de Publicis et Carrefour, pour développer le retail media. Le marché européen des centrales d’achats est déjà structuré autour de plusieurs alliances : Eurelec (E. Leclerc, Rewe, Ahold Delhaize), Everest (Aura, Edeka, Picnic, Jumbo), Vasco International Trading (Colruyt, Superunie, Coop Group), et AgeCore (Colruyt, Coop, Conad, Eroski, Kaufland). Ces alliances négocient soit les tarifs de base (« 3xnet »), soit les prestations de service (« on-top »), rendant le paysage des négociations de plus en plus complexe pour les grandes marques. La création de Concordis soulève des questions sur la légalité de telles centrales européennes et le respect des pratiques commerciales, notamment la date butoir de fin des négociations en France (1er mars). Elle interroge aussi sur la réaction d’E. Leclerc, désormais en troisième position pour les grandes marques, et sur la capacité de Lidl et Aldi à résister à la concentration du marché.