La publication par R. Venturi et D.S. Brown de Learning from Las Vegas a suscité une controverse à partir de 1968 dans l'histoire moderne de l'architecture. V. Didelon met en lumière comme cet ouvrage a inauguré un nouveau genre de livre d'architecte, le manifeste rétroactif, qui s'est depuis imposé notamment grâce à R. Koolhaas.

L'ouvrage rassemble une quinzaine d'auteurs — architectes et chercheurs avec pour objectif de viser un public large de militants associatifs, d'élus engagés, et de citoyens intéressés à mieux comprendre les interactions entre environnements construit, social et naturel. Le livre viendra ainsi en complément de la littérature existante sur les effets qu'exerce l'écologie sur la théorie et la pratique de l'architecture en interrogeant la réciproque qui jusqu'ici a été peu discutée. L'ouvrage est dirigé par Valéry Didelon qui, dans ses nombreux écrits, explore l'hétéronomie de l'architecture, c'est-à-dire les dépendances croisées entre logiques formelles, techniques et sociales au sein des processus de conception et de construction. Les cinq premiers textes apportent un éclairage historique sur la manière dont les pensées de l'écologie ont accompagné un certain nombre d'architectes au cours du XXe siècle, mais surtout sur la façon dont certains d'entre eux ont alimenté en retour le débat public naissant sur les atteintes à l'environnement engendrées par la modernisation, le capitalisme industriel ou encore le fait colonial. Les quatre textes suivants amènent à considérer la situation contemporaine, et montrent comment dans le cadre de pratiques professionnelles ordinaires, les archi­tectes – et les paysagistes – savent questionner, détourner et faire évoluer l'idée que se font les élus et maîtres d'ouvrage d'une approche écologique de l'aménagement de l'espace. Soumis à de multiples injonctions et contraintes, les concepteurs semblent ainsi capables de réinventer la commande, et au-delà d'orienter la demande sociale. Les cinq derniers textes se veulent plus prospectifs. Ils dressent le portrait d'architectes qui commencent à s'aventurer hors de leur périmètre habituel d'inter­vention, mettent leurs compétences et connaissances particulières au service d'un activisme politique et social, et font donc de l'architecture l'un des principaux laboratoires de l'écologie.