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Boulangerie-sandwicherie. Face à la concurrence, les acteurs historiques à la relance

Numéros de page :
pp.24-28
La France a remporté la Coupe du monde de la boulangerie en janvier 2024 lors du salon Europain, illustrant la force du secteur avec 28 000 boulangeries générant un chiffre d’affaires global de 10,6 milliards d’euros en 2024, soit une progression de 11% par rapport à 2023. Le chiffre d’affaires moyen par établissement atteint 380 000 euros. Les indépendants restent majoritaires, mais les chaînes historiques (Brioche Dorée, Paul, La Mie Câline, etc.) s’adaptent face à la concurrence accrue et à l’évolution des modes de consommation. Désormais, 55% du chiffre d’affaires des boulangeries provient du snacking, marquant un transfert de parts de marché au détriment de la restauration assise. Les enseignes historiques ajustent leur offre pour répondre à la demande croissante de restauration rapide et diversifiée, tout en cherchant à séduire la génération Z, qui occupe une place centrale dans la consommation hors domicile. Brioche Dorée a rénové plusieurs points de vente (Paris Opéra, Rennes, Vannes, aéroport CDG) en misant sur la viennoiserie, qui représente 70% des tickets, et en introduisant des innovations comme les clubs sandwichs briochés, brioches à la découpe et boissons gourmandes. Les boutiques rénovées enregistrent une croissance à deux chiffres, portée par une fréquentation accrue des moins de 25 ans. Paul, leader incontesté du sandwich, affiche un chiffre d’affaires de 440 millions d’euros en 2024 avec 416 points de vente, en légère baisse de 1%. Brioche Dorée réalise 271 millions d’euros (+1%, 239 points de vente), La Mie Câline 360 millions d’euros (+16%, 247 points de vente), et La Croissanterie 210 millions d’euros (+4%, 247 points de vente). Sur le segment boulangerie, Marie Blachère domine avec 1,1 milliard d’euros (+10%, 831 points de vente), suivie d’Ange (400 millions d’euros, +18%, 276 points), Feuillette (210 millions d’euros, +40%, 80 points), Boulangerie Louise (119 millions d’euros, +4%, 133 points) et La Pânetière (116 millions d’euros, +5%, 222 points). Les enseignes multiplient les initiatives pour rester attractives : renouvellement de concepts, modernisation de l’identité visuelle, élargissement de l’offre (petit-déjeuner, déjeuner, goûter), et adaptation aux nouveaux usages imposés par les moins de 35 ans. La Mie Câline déploie son concept « MC4 » avec des espaces dédiés aux boissons chaudes et prévoit sept ouvertures d’ici début 2026, tout en maintenant un prix de menu autour de 10 euros. L’international devient un levier de croissance : Brioche Dorée exploite des points de vente dans les aéroports de Djeddah, Abou Dabi et Riyad ; La Croissanterie est présente dans huit pays africains, a ouvert en Arabie saoudite et Roumanie, et a signé une master-franchise en Ouzbékistan. Paul réalise 53% de son chiffre d’affaires à l’international et développe le concept « Paul le Café » (6 à 7% du CA France), qui se concentre sur le snacking sucré-salé et le café, avec des surfaces 30 à 40% plus petites que les boulangeries classiques. Le travel retail (gares, aéroports, stations-service) est un axe majeur de développement. Un accord entre Carrefour et Lagardère Travel Retail prévoit 150 points de vente dans les gares SNCF d’ici 2030. Brioche Dorée a remporté un appel d’offres pour 13 nouveaux points dans les aéroports parisiens en 2023, et 40% de son réseau est concentré dans les gares SNCF. Paul estime que les sites de transport représentent deux tiers des implantations de Paul le Café en France. Pomme de Pain, après avoir fermé 20 sites non rentables en cinq ans, relance sa stratégie avec un concept modernisé (nouvelles couleurs, bornes digitales, offre élargie autour du bagel et des pains briochés), déployé à Boulogne-Billancourt (110 m²) et Belle-Épine (330 m²), avec douze ouvertures supplémentaires prévues cette année. L’enseigne vise à rajeunir sa clientèle, dont un tiers a entre 15 et 25 ans, et un autre tiers entre 25 et 39 ans. La Croissanterie modernise son concept avec une identité visuelle orange vitaminée, renouvelle sa carte quatre fois par an avec une vingtaine d’innovations, et séduit de plus en plus de master-franchisés à l’international. Les enseignes recrutent aussi des profils issus de grandes chaînes internationales pour renforcer leur professionnalisation et leur culture d’entreprise. Les grandes chaînes de boulangerie traditionnelles comme Marie Blachère et Ange n’ont pas encore investi massivement les centres-villes, en raison du coût élevé des fonds de commerce et des loyers urbains, laissant le champ libre à des acteurs premium et urbains comme The French Bastards ou Feuillette, qui teste son concept Café Feuillette en centre-ville. Face à une concurrence agressive et disparate, les acteurs historiques doivent continuer à innover, à se réinventer et à conquérir les jeunes générations pour préserver et développer leurs parts de marché.