L'Eté. Moissons fortes
Bulletin : LH le magazine juin 2025
01 juin 2025
Numéros de page :
pp.97-103
Entre mi-juin et mi-août 2024, le volume de livres vendus en France a augmenté de 1,1 % par rapport à l’année précédente, avec un chiffre d’affaires en hausse de 6,1 %, principalement dû à une augmentation du prix moyen du livre de 5 %, atteignant 12,12 €. Un tiers des ventes estivales s’effectue en juin, près de la moitié en juillet, puis une baisse s’amorce en août avant la rentrée littéraire et ses 600 nouveaux titres annuels.
Les livres de poche dominent largement le marché estival, représentant 73,1 % des ventes, tandis que le grand format, en progression de 12 % par rapport à 2023, capte le quart restant, principalement grâce aux best-sellers. Parmi les titres les plus vendus en grand format figurent Le barman du Ritz de Philippe Collin, Le nid du coucou de Camilla Läckberg, Un animal sauvage de Joël Dicker, Quelqu’un d’autre de Guillaume Musso, Norferville de Franck Thilliez et Plus grand que le ciel de Virginie Grimaldi.
Freida McFadden, autrice de la saga La femme de ménage, s’impose avec près de deux millions d’exemplaires vendus en 18 mois. Ses nouveautés, La prof (City) et Lapsy (J’ai lu, en poche), sont attendues comme des succès majeurs de l’été. J’ai lu, maison de poche du groupe Flammarion, fonctionne avec 40 % d’inédits en grand format et semi-poche, et a vu ses ventes doubler depuis la parution en poche de La femme de ménage.
Le roman Mon vrai nom est Élisabeth d’Adèle Yon, publié aux Éditions du sous-sol, a bénéficié d’un lancement en février, mois jugé plus propice que janvier, et visait 50 000 exemplaires avant l’été. Le bouche-à-oreille et la presse ont joué un rôle clé dans sa diffusion, chaque lecteur devenant prescripteur pour quatre ou cinq autres. Un précédent succès similaire avait été Jours barbares de William Finnegan, lauréat du prix Pulitzer 2016.
Les librairies côtières, comme L’Angle rouge à Douarnenez et Charlemagne à Hyères, adaptent leur offre à la clientèle estivale, privilégiant les poches, les valeurs sûres et les lectures faciles. À Douarnenez, les ventes sont portées par des titres féministes et des questions de genre, comme Une belle grève de femmes d’Anne Crignon ou Mon vrai nom est Élisabeth d’Adèle Yon. À Hyères, L’île de Yule de Johana Gustawsson s’est vendu à 65 000 exemplaires, et la nouveauté Les morsures du silence a eu un premier tirage à 25 000 exemplaires.
Le retour du romanesque et des littératures de l’imaginaire, y compris la science-fiction, traduit une volonté d’évasion chez les lecteurs. La saga Destinée suédoise de Katarina Widholm a atteint 50 000 exemplaires, et HarperCollins mise sur le tome IV ainsi que sur la version poche de La jurée de Claire Jéhanno (45 000 exemplaires vendus en grand format).
Le polar et le roman noir restent des valeurs sûres de l’été, avec H de Bernard Minier, À retardement de Franck Thilliez, Mirage de Camilla Läckberg et Les maîtres du domaine de Jo Nesbø (tiré à 50 000 exemplaires, suite d’un titre vendu à plus de 160 000 exemplaires en France). Gallimard poursuit son opération « Lectures d’été » et mise sur des auteurs comme Leïla Slimani, David Foenkinos, Karine Tuil et Chimamanda Ngozi Adichie, dont les titres réalisent près de 30 % de leurs ventes annuelles durant l’été.
Un essai, L’heure des prédateurs de Giuliano da Empoli, se distingue en tête des ventes, surfant sur le succès du Mage du Kremlin (Grand Prix du roman de l’Académie française 2022), illustrant l’émergence de la non-fiction dans les lectures estivales.
Le lectorat féminin façonne de plus en plus le marché de l’été. Lucinda Riley a vendu 1,3 million d’exemplaires (poches compris) en 2024, La Rose de minuit atteignant 70 000 exemplaires en douze semaines. La dernière allumette de Marie Vareille a cumulé 60 000 exemplaires en grand format, et Etvivalavida! de Sophie Jomain a dépassé 10 000 exemplaires en poche en neuf semaines. Charleston, maison fondée en 2013, mise sur des romans mettant en avant la force des femmes et lance la maison Nami, axée sur la « healing fiction », avec des succès comme Bibliothèque des rêves secrets de Michiko Aoyama (deux millions d’exemplaires vendus avant son arrivée en France à l’été 2022).
Le classement des meilleures ventes de juin à août 2024 place La sage-femme d’Auschwitz d’Anna Stuart en tête, suivie de Une belle vie de Virginie Grimaldi, Le barman du Ritz de Philippe Collin, Angélique de Guillaume Musso, Les femmes du bout du monde de Mélissa Da Costa, et La femme de ménage de Freida McFadden. Lucinda Riley place trois romans dans le top 50, Colleen Hoover deux. Les romancières françaises les plus lues sont Virginie Grimaldi et Mélissa Da Costa, suivies de Guillaume Musso et Franck Thilliez. Les quatre tomes de la saga Seasons de Morgane Moncomble figurent également dans le classement.
En résumé, l’été 2024 confirme la domination du livre de poche, la montée du prix moyen, la force des best-sellers, l’importance croissante du lectorat féminin, le retour du romanesque et de l’imaginaire, la percée de la non-fiction, et la capacité des libraires à adapter leur offre aux attentes saisonnières. Les chiffres clés : +1,1 % de volume de ventes, +6,1 % de chiffre d’affaires, prix moyen à 12,12 € (+5 %), près de deux millions d’exemplaires pour Freida McFadden en 18 mois, 1,3 million pour Lucinda Riley en 2024, 70 000 exemplaires pour La Rose de minuit en douze semaines, 65 000 pour L’île de Yule, 50 000 pour la saga Destinée suédoise, 45 000 pour La jurée, 60 000 pour La dernière allumette, 10 000 pour Etvivalavida! en neuf semaines, 50 000 pour Les maîtres du domaine, plus de 160 000 pour Leur domaine, et deux millions pour Bibliothèque des rêves secrets avant son arrivée en France.