Aller au contenu principal

Pourquoi Bel a raté son pari végétal avec Nurishh

Bulletin : LSA 2847
12 juin 2025
Auteurs
Numéros de page :
pp.20-21
Cinq ans après le rachat d’All in Foods et le lancement de la marque végétale Nurishh, Bel annonce l’arrêt de cette marque et la fermeture de l’usine de Saint-Nazaire d’ici fin 2025, entraînant 35 licenciements. Malgré des débuts prometteurs, avec 44 % de part de marché en valeur sur le segment des substituts au fromage et 46 % de la croissance du marché en 2021, Nurishh n’a pas réussi à s’imposer durablement. Les raisons de cet échec incluent un positionnement peu différenciant, une expérience gustative jugée insuffisante, une identité de marque trop fade malgré un rebranding en 2024, et un faible recrutement de nouveaux consommateurs au-delà des flexitariens et végétaliens déjà acquis. Bel avait pourtant multiplié les initiatives : en 2023, un partenariat avec la start-up américaine Perfect Day pour intégrer des protéines laitières non animales issues de la fermentation de précision, puis en 2024, un partenariat avec Climax Foods, spécialisée dans l’intelligence artificielle appliquée aux substituts végétaux (bleu, brie, feta). Parallèlement, Bel a investi 9 millions d’euros sur trois ans dans le projet Cocagne, aux côtés d’Avril, Lallemand et Protial, pour développer des produits fermentés ou affinés à base végétale. Malgré ces efforts, la marque n’a pas dépassé 1 % de part de marché mondiale, loin derrière Violife (Upfield) qui détient 22 %. La fermeture de l’usine de Saint-Nazaire, intégrée en 2020, marque un tournant dans la stratégie de Bel, qui se recentre désormais sur ses marques emblématiques. Le groupe prévoit de poursuivre sa stratégie végétale à l’international avec des déclinaisons alternatives de Boursin, Babybel et La Vache qui Rit. En France, seul Boursin végétal est commercialisé, après une introduction réussie au Royaume-Uni fin 2024. Le marché des alternatives végétales au fromage reste modeste en France : en 2024, il a généré 630 millions d’euros, en hausse de 9,9 % par rapport à 2023. En GMS, les substituts au fromage ont progressé de 12 %, atteignant 12 millions d’euros, mais ne touchent que 3,5 % des Français. Les ventes en volume ont augmenté de 12,4 %, atteignant 722 tonnes. Le panier d’achat moyen a progressé de 1,1 point en deux ans (+18 % vs N-1), atteignant 17,7 € par acheteur et par an (+8 € en deux ans, +23 % vs N-1). L’adoption reste limitée en raison du prix élevé, d’une faible notoriété, d’une mauvaise lisibilité des produits et de la préférence pour le goût du fromage traditionnel. Sur le marché français, Violife domine avec 40 % de part de marché, devant Nurishh (30 %) et Tartare (16 %). D’autres acteurs comme Jay & Joy, leader dans les circuits bio, investissent la GMS avec une gamme artisanale sous la marque Les Nouveaux Affineurs, rachetée début 2025. Les Veilleurs (Olga) proposent une alternative complémentaire, misant sur la diversité et la qualité gustative pour séduire les flexitariens. Les alternatives végétales au fromage, déjà bien implantées en Allemagne, aux Pays-Bas et au Royaume-Uni, devraient voir leur nombre tripler en France d’ici 2028, avec une perspective de rattrapage du retard français dans les cinq prochaines années.